« Les friches peuvent constituer une opportunité »

Photo : Camille Granjard/EPJT

Le gouvernement a lancé le Fonds friches en 2020. Aujourd’hui, plus de 1 100  friches en France vont pouvoir en bénéficier pour être rénovées. Ce qui explique en partie l’intérêt du Magasin général pour une entreprise comme Doliam. Mais, comme l’explique Olivier Legros, ce n’est pas le seul.

Recueilli par Lisa Morisseau

Olivier Legros est maître de conférences en géographie à l’Université de Tours. Il enseigne notamment la géographie urbaine et humaine, les enjeux, procédures et acteurs de l’aménagement dans le monde arabe. Il a aussi travaillé sur les politiques en direction des bidonvilles « rom », des espaces dévalorisés situés généralement en périphérie des villes, parfois installés sur les friches industrielles.

Un tel espace, pour un territoire, qu’est-ce que cela représente ? 

Olivier Legros est directeur du département de géographie de l’université de Tours. Par ailleurs il est membre de l’équipe Monde Arabe Méditerranée de l’UMR CITERES (CNRS-Université de Tours). Photo : Camille Granjard/EPJT

Olivier Legros. Les friches, ce sont d’abord un problème car qui dit « friche industrielle » dit « destruction d’emplois ». Cela implique donc une augmentation du chômage, une population précarisée au niveau de l’emploi et, enfin, un manque à gagner pour le financement des communes. Mais en même temps elles peuvent constituer une opportunité. En effet, dans un espace où il y a de moins en moins de terrains libres et où ils sont de plus en plus chers, on peut y envisager de nouveaux développements urbains avec l’implantation de nouvelles activités.

Sur le site du Magasin général de Saint-Pierre-Des-Corps, l’entreprise Doliam envisage de devenir le premier campus européen dédié aux innovations technologiques en santé. Pourquoi selon vous cette holding vient-elle s’installer ici ?

O. L.  À Saint-Pierre-des-Corps, il y a des éléments stratégiques qui peuvent intéresser une holding. J’en vois au moins deux. Le premier, c’est la présence d’une gare TGV qui permet de mieux connecter les nouvelles activités qui vont être implantées. C’est un emplacement stratégique du fait de la proximité avec des grands axes de transports. D’ailleurs, ces axes ne se limitent pas à la gare TGV, c’est aussi l’autoroute qui n’est pas loin. Saint-Pierre-des-Corps, c’est la porte de Tours mais, quelque part, c’est aussi la porte de Paris. L’autre intérêt, c’est qu’à Saint-Pierre-des-Corps, les terrains sont moins chers que dans la région parisienne. Voilà les éléments qui me semblent expliquer les choix stratégiques de l’acteur économique. Mais je ne peux pas répondre à sa place.

Dans la commune de Bléré, toujours en Indre-et-Loire, une consultation citoyenne a été lancée en octobre 2021 pour choisir le futur d’une ancienne fonderie. Pensez-vous que les citoyens ont aussi un rôle à jouer dans la réhabilitation de ces friches ? 

O. L. Je n’ai pas un point de vue moral sur cette question. Je m’interroge sur les citoyens qui se sont prononcés. Ce ne sont pas tous les citoyens mais une partie des citoyens. D’après mon expérience, j’observe que la participation ne se limite pas aux formes instituées, c’est à-dire la participation à la vie démocratique à travers les élections ou les consultations organisées par l’Etat. Elle s’exprime également par l’instauration des rapports de force.