Consommer ou planter, à vous de choisir

Myriam Kopacz et sa petite fille dans la cuisine de la ferme Larroque, à Aigrefeuille.

Dans la ferme Larroque, la famille Fignes produit et vend à la fois la semence, le plant de légume et le légume lui-même. Une idée originale qui fait recette.

Manon VAN OVERBECK (texte et photos)

Découvrir la ferme Larroque, c’est entrer dans un espace hors du temps, où toutes les générations se croisent. Parents, enfants et petits-enfants sont réunis pour donner vie à ce lieu historique situé dans la commune d’Aigrefeuille, en Haute-Garonne. La famille Fignes y est installée depuis 1938.

Myriam Kopacz et son mari Stéphane Fignes ont repris l’exploitation agricole en 1999. Aujourd’hui, légumes et plantes, toujours de saison, sont produits sur 3 000 mètres carrés de tunnels froids (serres non-chauffées) et 1 hectare de jardin. La vente se fait tous les jours, directement à la ferme et une fois par semaine au marché voisin de Quint-Fonsegrives.

Myriam Kopacz, 47 ans, est titulaire d’un BEP production horticole. Pour elle, « le bio, c’est de la poudre aux yeux. En recherchant à tout prix une étiquette bio, nombreux sont ceux qui passent à côté de la qualité ». À la ferme Larroque, les produits peuvent être traités et manipulés chimiquement, même si ces opérations restent rares. Les producteurs n’hésitent pas à varier les engrais, en fonction des besoins de chaque plante.

« Le produit peut être moche mais son goût doit être exceptionnel »

La famille cultive néanmoins à l’ancienne : aucune mécanisation et des récoltes à la main. Et, surtout, on donne du temps aux légumes. Une salade pousse en trois semaines chez un maraîcher à production intensive. Il lui faut deux mois dans la ferme Larroque. Car si un légume va à son rythme, pendant la bonne saison et avec les éléments nutritifs nécessaires, il est moins susceptible d’être attaqué par des envahisseurs et sera meilleur au goût. « Ce que nous cherchons par dessus tout, c’est la qualité gustative, pas visuelle. Le produit peut être moche mais son goût doit être exceptionnel », explique l’agricultrice.

A la ferme Larroque, on dénonce la vente des mêmes légumes trois cent soixante-cinq jours par an en supermarché, qu’on trouve insensée. « Mon rôle est de réapprendre aux gens à manger selon les saisons », souligne Myriam Kopacz.

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A la ferme Larroque, une partie de la production se fait en tunnel froid, c'est-à-dire en serre non-chauffée.

Et le pari semble être réussi. Malgré des prix plus élevés (3,50 euros le kilo de tomates contre 1,20 euro en grande surface), le samedi matin, les stocks sont vite épuisés sur le marché de Quint-Fonsegrives. Laurence, retraitée, témoigne : « Je n’ai jamais été déçue par leurs produits. Quand je vais les voir, je trouve toujours ce que je recherche. »

Savoir vendre son savoir-faire

L’originalité de la maison Larroque se situe cependant ailleurs : on n’y achète pas que des légumes mais aussi des semences et des plants. La clientèle de jardiniers amateurs a beaucoup évolué au fil du temps : elle est de plus en plus jeune. Myriam Kopacz aime qualifier ses nouveaux clients de « jardiniers estivaux », juste attirés par un loisir sous le soleil. A l’agricultrice alors de transmettre son savoir pour pallier une éducation familiale perdue du jardinage. « L’échange et la convivialité étaient primordiaux avant. C’est ce qui manque à la société actuelle. Mais on retrouve ces valeurs dans le travail du potager », constate Myriam Kopacz.

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Le potager de la ferme.

Vendre les produits à la ferme permet donc de donner des conseils sur le choix de plants, sur la pousse des légumes et même des recettes. Une plus-value indéniable. « Ils prennent toujours le temps de bien expliquer leurs astuces afin qu’elles soient accessibles à tous », se félicite Laurence, la fidèle cliente. Myriam Kopacz l’assure : quand ils la rencontrent et visitent la ferme, ses clients peuvent « voir la vie qu’ils viennent chercher ».

Cette ferme, en jouant sur la proximité, casse les codes des grandes enseignes où la recherche de la rentabilité maximale empêche toute communication. Elle ne connaît pas le marketing et sa seule publicité consiste à offrir des œillets pour l’achat de légumes. On trouve de l’humanité à revendre à la ferme Larroque.