De la pétanque
à tout âgeLes joueurs de pétanque se rassemblent tous les soirs dès 18 heures.
Sur les terrains sablonneux de Nouakchott, la pétanque, sport discret mais profondément ancré, tisse chaque jour des liens entre les générations. Le boulodrome devient ainsi un lieu de transmission, d’échanges et de convivialité où anciens et jeunes se retrouvent autour du jeu et du thé.
Par Annabelle Boos (texte) et Corentin Vallet (Photos)
Aujourd’hui, c’est un événement un peu spécial qui se prépare. Un petit tournoi est organisé pour préparer les joueurs aux championnats du monde prévus en décembre à Dijon. Et, pour l’occasion, une cinquantaine d’hommes de tout âge ont fait le déplacement depuis toute la capitale. Dans ce coin sans nom, entre poussière et béton, la pétanque est un langage commun, une école silencieuse où les générations se croisent.
Les femmes restent à l’écart
Brahim Ahmed Youra à découvert la pétanque lorsqu’il était au lycée. « J’ai commencé à jouer après avoir assisté à un match où il y avait beaucoup de tirs. Ça m’a donné envie mais, à ce moment-là, j’étais encore un peu jeune. » Il succombera quelques mois plus tard à l’appel du jeu en s’offrant sa première triplette. Près de trente ans plus tard, il prend toujours autant de plaisir à venir tous les soirs sur les boulodromes de Nouakchott.
Alors que beaucoup d’activités tendent à séparer les générations, la pétanque fait figure d’exception. « C’est un sport très apprécié partout en Mauritanie, explique Dr Yacoub Boubou, ancien vice-président de la fédération mauritanienne de pétanque. Elle rassemble toutes les ethnies et toutes les catégories d’âge. » Ce soir, sur un même terrain, un adolescent et un retraité jouent en doublette, discutent et finissent par rire autour d’un thé bouillant.
Un thé, préparé par les femmes qui restent à l’écart des jeux. Pourtant, rien ne les empêche de venir jouer avec les hommes. « Ce n’est pas interdit, explique Dr Yacoub. Il y avait même une équipe, il y a quelques années, mais peut-être qu’elles ne se sentent pas à l’aise. »

L’équipe mauritanienne de pétanque occupe actuellement la cinquième place au classement général des équipes en triplettes.
Des pauses où le thé circule dans des verres brûlants ponctuent chaque partie. Au moment de l’appel à la prière. Dès les premières secondes, petits et grands lâchent leurs boules et se rassemblent pour prier avant de reprendre la partie là où elle en était.
Dans un monde où les générations semblent parfois parler des langues différentes, la pétanque mauritanienne offre un espace rare : un lieu d’égalité, de transmission, de partage. Ely Sheikh y joue depuis 2015. « J’ai joué dans trois clubs et, dans chacun, je me suis fait des amis. Maintenant encore je me fais des amis dans différentes villes du pays pendant les compétitions. »
Lorsque le soleil se couche, les boules ne s’arrêtent pas pour autant. Les parties se poursuivent dans la nuit. Une fois la ville endormie, seuls les bruits des boules, des éclats de voix et des rires d’hommes font encore vibrer le quartier.