’Pour la 39e édition de la journée mondiale des jeunes, l’Église de Nouakchott organisait un moment d’échange avec les jeunes chrétiens de la ville. L’occasion d’évoquer entre eux leur foi sur le sol de la République islamique de Mauritanie.
Par Victoire Renard-Dewynter (texte et photos)
À la pointe de la foule sortante de l’édifice sans clocher, Diomg, le plus âgé des servants d’autel, devance le père Edmond Théodore Vaz. Il porte la grande croix. Vêtu de sa toge blanche de service, il marche avec assurance accompagné de six autres enfants de cœur. En dehors de ces murs, il n’est pas aussi confiant. En dehors de ces murs, il cache sa foi chrétienne. « Je ne dis pas que je suis chrétien. Ce n’est pas facile de vivre [en République Islamique de Mauritanie] avec ma foi, mais j’ai confiance en Jésus et ça jusqu’à ma mort » affirme-t-il.
Autour de lui,tous sont étrangers. Il n’existe aucun chiffre officiel sur la pratique religieuse en Mauritanie. Selon l’International Religious Freedom Report de 2019, les chrétiens représentent moins de 1 % de la population. Aucun d’entre eux ne peut obtenir la nationalité du pays qui les accueillent. En Mauritanie, l’islam est la religion d’État, pour être citoyen, il faut être musulman.
Les autres religions sont tolérées dans le pays. L’Église catholique est respectée par les autorités et la population grâce à son implication auprès des plus démunis.
Pour Billy, Céleste et Noura, vivre dans un pays où la religion est aussi présente renforce la leur. Tous les trois, vêtus d’une écharpe blanche où est indiqué JMJ 2024, se sont mis à l’ombre sous le porche de l’Église.
Noura vit cette différence culturelle et religieuse depuis toujours. Une mère chrétienne, un père musulman, toute son enfance en Guinée est bercée par l’échange et le partage, la compréhension des deux religions.
Elle aime parler de spiritualité avec ses amies et venir découvrir les autres religions. « Je soutiens ma mère aujourd’hui en venant à la messe et je vois mes amis chrétiens. Je participe à cette journée pour les jeunes chrétiens alors que je suis musulmane » affirme-t-elle.
« Parfois, j’entends des Mauritaniens dire que le christianisme est une mauvaise chose, je pense juste qu’ils ne savent rien de la religion chrétienne » poursuit-elle.

Jean-Pierra a toujours vécu en Mauritanie, il ressent surtout au travail une pression sociale lié à la religion.

L’Église n’est pas reconnue juridiquement par l’État mauritien. Les relations entre le pays et le Saint-Siège ont commencés en 2015.
Le père Edmond Théodore Vaz en est conscient : « L’exode est dans chacun de vous. Vous êtes sur un territoire où l’on vous considère comme étrangers, mais ne perdez pas espoir, le Seigneur ouvre une route d’espérance », encourage-t-il.
Après le lancement des activités prévues pour la journée, les jeunes partagent un repas, dans la bonne humeur. La jeunesse représente « l’avenir du monde, l’avenir de l’Église. J’essaye de leur transmettre la foi, car la foi, c’est ce qu’on peut donner de meilleur », ajoute le père avec confiance.
« De l’extérieur, certains pourraient penser que nous sommes persécutés, mais ce n’est pas le cas », assure le prêtre, arrivé
La Journée mondiale de la jeunesse représente ainsi une occasion précieuse pour « affermir la foi des jeunes, un moment où les doutes s’accentuent, où les questions grandissent, encore plus dans un pays musulman, où elles sont fréquentes ». Face aux défis du quotidien, il partage son conseil pour éviter l’isolement : « échanger un maximum avec l’extérieur, partager la peine et la joie en tant que chrétien. »