Harcèlement, humiliation, exclusion… La majorité des élèves infirmiers affirme avoir subi des violences pendant un stage. Pourtant, peu de moyens sont mis en place pour mettre fin au calvaire de ces étudiants.
Par Axel Nadeau
Les cas d’humiliations sur les stagiaires sont fréquents dans le monde hospitalier. Aujourd’hui professionnelle, Julia garde de mauvais souvenirs de ses stages, surtout de celui à la clinique Saint-Gatien de Tours. A l’époque, elle s’occupe d’une patiente qui ne peut pas se tenir debout. Elle choisit de lui faire la toilette au lit, contrairement à ce que son infirmière référente lui demande. « Elle m’a dit que j’étais une merde, que je ne valais rien, que je ne serai jamais diplômée », se souvient Julia. Pourtant, un chirurgien de l’hôpital lui assurera qu’elle avait agi comme il fallait.
« L’humanité c’est notre cœur de métier »
Publié en 2017, Omerta à l’hôpital (ed. Michalon) du Dr. Valérie Auslender réunit 130 témoignages d’élèves victimes de maltraitances en milieu hospitalier. On y découvre qu’en 2015, sur un groupe de 3 500 étudiants infirmiers, 7 % affirment avoir pensé à mettre fin à leurs jours sur le lieu de leur stage.
Ces chiffres n’étonnent pas Sébastien Bocquet-Vial, psychologue, en charge des étudiants à l’Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) d’Amboise. Il a déjà eu affaire à de nombreux cas de maltraitance sur les stagiaires. « C’est un raz-de-marée assez violent, on vient toucher au propre de l’individu », s’exclame-t-il.
Les stagiaires font fusibles
Si ces maltraitances ne peuvent être justifiées, les professionnels concernés cherchent néanmoins à les expliquer. Selon Dominique Gosnet, directeur de l’IFSI d’Amboise, l’hôpital est en pleine mutation. On constate une diminution de la bientraitance liée à une réduction d’effectifs et à la recherche du bénéfice dans les hôpitaux. « Les infirmières sont surbookées, explique le directeur de l’établissement, et il devient difficile d’encadrer les étudiants. » Le personnel infirmier peut avoir tendance à décharger cette pression sur les stagiaires. « Comme ils doivent garder une certaine tenue face au patient, les collègues font fusibles, atteste Sébastien Bocquet-Vial. C’est très facile avec les stagiaires, ils peuvent devenir des larbins. »
Luc souhaitait devenir infirmier depuis l’école primaire. Ses stages l’ont poussé à arrêter sa formation. Puis, alors qu’il était en service civique, il rencontre une équipe de femmes qui lui font croire à nouveau en ses capacités. Aujourd’hui il a commencé sa troisième année. « Si ça se reproduit, je serai capable de dire les choses », assure-t-il. Son stage de début d’année s’est très bien passé. On lui a même certifié qu’il avait beaucoup de potentiel.
Certains prénoms ont été changés à la demande des intéressés.
Axel Nadeau
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24 ans
Etudiant en année spéciale journalisme à l’EPJT.
Passé par la Ferarock et divers webzines musicaux.
Bientôt en stage chez Society et 37 degrés.
Intéressé par les questions sociétales et culturelles.
Passionné de multimédia, se destine à la presse écrite.