Depuis la crise du Covid-19, une camionnette de la Croix-Rouge fait régulièrement le tour des sites universitaires tourangeaux. A son bord, une épicerie ambulante qui propose aux étudiants précaires des produits alimentaires ou d’hygiène à prix cassés.
Par Julien Grohar
Il est 15 heures ce vendredi, quand une camionnette floquée « Croix-Rouge Française » se gare sur le campus de Grammont. Sous la pluie, trois personnes en sortent et commencent à décharger des dizaines de caisses en bois. Boîtes de conserves, pots de confiture, fruits, légumes, et bien d’autres denrées alimentaires sont installées sur une table. Dans la camionnette, des produits d’hygiène sont installés sur des étagères en bois. Le contenu d’un réfrigérateur complète l’offre de l’épicerie ambulante.
Depuis la pandémie de Covid-19, la Croix-Rouge 37 organise des distributions alimentaires sur cinq sites universitaires de la ville de Tours. La camionnette nommée P’tit Kdi’ s’installe tous les deux jours sur un campus, et pour la modique somme de 4 euros, les étudiants repartent avec un sac rempli à raz bord équivalent à deux semaines de courses pour une personne. Les denrées proviennent des dons que la Croix Rouge reçoit, du CHU de Tours, mais aussi de la Banque alimentaire, avec qui ils forment un partenariat.
Réalisé par Julien Grohar/EPJT
« J’ai entendu parler de cette camionnette pour la première fois il y a un an. Depuis j’y vais à chaque fois qu’elle passe », confie Marwa, 26 ans, doctorante en physique des matériaux et des nanostructures à Grammont.
De nationalité tunisienne, Marwa est arrivée à Tours il y a un an et demi pour écrire sa thèse. La bourse de 2 000 euros annuels qui lui est attribuée par son université d’origine et les quelques heures de travaux dirigés qu’elle anime ne suffisent pas. « Après avoir payé toutes mes charges, il ne me reste que 60 euros pour vivre. Sans le P’tit’ Kdi’, ça serait beaucoup plus compliqué », explique-t-elle.
« Le pire à Tours, c’est le loyer »
Près d’une heure après être arrivée, la distribution bat son plein. Des étudiants qui passent devant la camionnette s’arrêtent, curieux, et parfois rejoignent la file d’attente. Les cageots se vident petit à petit mais la queue, elle, ne diminue pas.
Chaque distribution profite à une soixantaine d’étudiants et le dispositif n’est pas prêt de s’arrêter. Selon l’Association générale des associations tourangelles étudiantes (Agate), en 2023, une rentrée universitaire à Tours aurait coûté 2 500 euros en moyenne par étudiant.
« Pour moi le pire ici, c’est le loyer. Si tu ne trouves pas une place dans un Crous tu peux laisser tomber ton année » se plaint Sékou, étudiant sur le campus de Grammont, habitué de l’épicerie ambulante. « Heureusement qu’ils sont là. En plus on mange bien ! Avant eux, je n’avais presque jamais goûté au bio », sourit-il, une boîte de lentilles à la main.
Réalisé par Julien Grohar/EPJT
La distribution est ouverte à tous mais, depuis cette année, la Croix-Rouge 37 doit rendre des comptes à l’État. Pour continuer à percevoir ses aides, elle doit exiger désormais l’identité des personnes qui se présentent ainsi que leur carte étudiante.
Les étudiants remplissent une feuille d’inscription qu’ils doivent rendre lors du passage suivant. Ils doivent y préciser leurs ressources financières qui doivent obligatoirement être inférieures à un certain plafond s’ils veulent continuer à bénéficier de l’épicerie.
Vers plus d’accompagnement
« C’est triste mais si on veut distribuer au plus grand nombre, il faut éviter les abus. Certaines personnes ne sont ni étudiantes ni en situation de précarité. Cela fait moins de produits à destination des personnes qui sont vraiment dans le besoin, que nous devons absolument mettre en priorité », regrette Nicole. Cette retraitée est bénévole depuis quatre ans.
En novembre dernier, une nouvelle convention signée avec l’Université de Tours. Elle a permis à la Croix-Rouge 37 d’avoir un local à sa disposition sur chaque campus. « Pour l’instant, nous sommes sur une distribution pure. Malheureusement, nous n’avons pas vraiment le temps de discuter avec les jeunes, déplore, Allyre Pain, responsable du dispositif P’tit Kdi’. Avec une permanence en parallèle de la distribution, nous voulons créer un espace de parole pour écouter les étudiants et leurs difficultés. »
Que ce soit pour des questions d’argent, de santé ou de logement, ces bénévoles connaissent bien les dispositifs en place à Tours. Gageons que ces permanence leur permettront également d’apprendre à mieux connaître « ces visages que nous voyons toutes les semaines et avec qui nous tissons des liens d’amitiés ».
Julien Grohar
24 ans.
Etudiant en journalisme à l’EPJT.
Se destine particulièrement à la radio
et la correspondance à l’étranger.