Photo : The Drone

Journaliste et musicien passionné Olivier Lamm est omniprésent dans le monde fermé de la presse musicale. Au sein de Libération, à la radio ou sur internet, le mélomane de 37 ans s’est fait un nom.

Par EPJT

Lemonade : arme de distraction massive ». Derrière ce titre accrocheur publié par Libération à propos du dernier album de Beyoncé, Olivier Lamm, le journaliste. Ou plutôt le chroniqueur de radio. Ou plutôt le musicien : il est également connu à Paris en tant que musicien sous le nom d’O’lamm. DJ et guitariste, il donne régulièrement des concerts improvisés dans son appartement qu’il diffuse ensuite sur YouTube. Car ce mélomane multiplie les casquettes.

Entre 1990 et 2013, les ventes de magazine culturels ont diminué de 47,2 % si on en croit le rapport annuel du ministère de la Culture et de la Communication. Parmi ces titres, des magazines et revues, hebdomadaires et mensuels, spécialisés dans l’actualité musicale ou la critique.

Une cinquantaine de titres fait heureusement toujours vivre la presse musicale française, souvent spécialisés dans un genre précis tel que le jazz, le rock ou encore le hip hop. Pour survivre et faire face à la crise, ils ont dû s’organiser et se réinventer.

« La musique est un marqueur de sociétés. Elle permet de parler de culture et de politique. »

Cheveux bouclés en bataille, lunettes rectangulaires à grosses montures et pull au col rond, il affirme être un « enthousiaste musical ». Pour le croiser, c’est chez les disquaires du 14e arrondissement de Paris qu’il faut aller. Il aime parler musique et en a justement fait son métier. « La musique n’est pas simplement une distraction le temps d’un trajet en métro. Il s’agit d’un véritable marqueur de sociétés, théorise-t-il. Elle permet aussi de parler de culture et de politique. »

Dans les années quatre-vingt-dix, à Paris, alors qu’il est encore au lycée, il publie avec des amis un fanzine, Planet Of sound. « Tout notre argent de poche allait dans l’impression en format A3, se remémore-t-il. Nous parlions de rock et de punk. » Déjà à l’époque, il lisait beaucoup de magazines musicaux. Sa passion, il la doit à des grands noms de la critique, des signatures de l’époque. « J’ai été élevé par des journalistes tels que Jean-Daniel Beauvallet, Joseph Ghosn des Inrocks ou Simon Reynolds, du magazine anglais The Wire », raconte-t-il.

« J’essaye de rester objectif, quitte à paraitre snob. Mais tant pis ! »

Sa première expérience dans une rédaction remonte à 2002. Au sein du magazine Trax, il s’épanouit au contact d’autres fans de musique électronique. Aujourd’hui, Olivier Lamm jongle entre plusieurs médias. En plus d’écrire des piges pour la rubrique culture de Libération, il rédige des dossiers de critiques pour la revue Audimat. Il intervient aussi à la radio. Ainsi, il anime à l’occasion l’émission « La Dispute » sur France Culture ou débat sur Radio Nova dans l’émission « Le Grand Mix », tard le vendredi soir.

Capture d’écran

Mais ce qu’il préfère avant tout, c’est écrire pour le webzine The Drone. Fondé en 2009 par deux anciens journalistes de l’émission d’Arte « Tracks », le site propose une approche de la musique basée sur les goûts de ses rédacteurs, du hip hop, du rock ou bien du rap.

À l’origine, The Drone sert de vitrine à la société de production qui le finance : Milgram. Olivier Lamm y rédige bénévolement des critiques depuis 2011. « Il y a un véritable travail éditorial, affirme-t-il. Même si il n’y a pas vraiment de modèle économique et que le site ne tire aucun bénéfice. » Les rédacteurs ont une totale liberté d’écriture, ce qui plaît à Olivier Lamm. « Il y a une partie critique dans ce que

j’écris, ce n’est en aucun cas une histoire d’opinion, développe-t-il.J’essaye de rester objectif, quitte à paraitre snob. Mais tant pis ! » S’il apprécie d’écrire sur Internet, il peine à cerner son public. Fidèles du site, internautes de passage.  « Sur Internet, je ne sais pas pour qui j’écris. Je ne sais pas si les lecteurs ont les mêmes goûts musicaux que moi ou non. Mais en fait,  je m’en fiche, c’est le principe de la critique. »

« Dans les colonnes de Libération, j’essaye de faire plaisir à tout le monde, quitte à faire une chronique sur Kanye West »

Olivier Lamm a rapidement appris à faire un grand écart entre ses articles publiés sur le webzine et ses chroniques dans Libération. « Je suis plus libre sur The Drone, déclare-t-il. Dans les colonnes de Libération, j’essaye de faire plaisir à tout le monde, quitte à faire une chronique sur Kanye West. »

À l’avenir il aimerait voir The Drone se développer et s’émanciper, avoir une totale indépendance économique. L’idée : pouvoir continuer à chroniquer librement en ligne et gagner sa vie grâce à un Webzine qui lui laisserait une totale liberté éditoriale. Le rêve de nombreux journalistes…

INTERNET, NOUVEL EL DORADO DE LA PRESSE MUSICALE

Capture d’écran 2016-08-20 à 02.18.24La presse musicale se réinvente aussi en ligne. Ces nouveaux magazines musicaux sont des pure-players. Traduisez par « tout en ligne ». Il s’agit d’une marque, d’un média, d’une entreprise dont l’activité ne se développe que sur Internet. Parmi les plus répandus en France, The Drone, mais également Noisey.
Ce dernier est la branche musicale du groupe de presse américain Vice. Apparu en français en 2011, son contenu se veut en rupture avec le conventionnel. Ainsi, les titres sont souvent accrocheurs et attisent la curiosité. Le ton est familier (« Punk rock, vidéo-clubs et pains dans la gueule ») et les sujets abordés sont, de près ou de loin, tous liés à la musique. Par exemple, l’interview d’un neuroscientifique – « Comment je choisis la musique qu’écoutent mes patients sous LSD » – complètera un article sur le rapport entre la drogue et la musique. La plateforme permet d’inclure des liens. Beaucoup de reportages vidéo sont ainsi proposés. Toujours sur un ton décalé, Noisey a, par exemple, publié un reportage sur un label qui produit de la musique composée pour les animaux : « La musique pour les chiens, par les chiens »