« Être fière à nouveau »
« Plus on roule, plus on rit », c’est le mot d’ordre du projet de Kim Ji-woo. Photo : Kim Ji-woo
À 22 ans, Kim Ji-woo est une figure pour de nombreux jeunes handicapés. Grâce à son imagination, elle dessine des fauteuils roulants originaux pour briser la triste image du handicap.
Par Célio Fioretti (à Séoul)
Des autocollants, du Plexiglas, un peu de tissus, et surtout, beaucoup d’imagination, c’est la recette de Kim Ji-woo pour être fière de son fauteuil roulant. À seulement 22 ans, la jeune étudiante multiplie les casquettes : influenceuse, vidéaste et même autrice. Handicapée de naissance, elle décide, à l’âge de 17 ans, de faire des vidéos, « un peu comme tout le monde le faisait à ce moment-là », se souvient-elle.
Kim Ji-woo possède une chaîne YouTube, Rolling Guru, qui compte aujourd’hui plus de 50 000 abonnés. À l’origine, « elle s’adressait aux personnes handicapées pour qu’elles aient une personne à qui s’identifier. Avec le temps, d’autres personnes sont venues pour mieux comprendre le handicap », explique la jeune femme.
Depuis, elle ne se contente plus de tourner de petites vidéos, mais souhaite avoir un véritable impact dans la manière de vivre le handicap. En 2021, elle lance son grand projet, Wheelchair of the month, dans lequel elle conçoit chaque mois un fauteuil roulant original. En parallèle, elle crée avec des jeunes de 10 à 20 des fauteuils décorés qu’ils peuvent utiliser. Cette idée vient de sa propre expérience.
« J’ai toujours été dans un fauteuil. Lorsque j’étais adolescente, c’était vraiment dur à vivre, raconte-t-elle. Les autres enfants, à l’école, me regardaient, me faisaient des remarques. Je ne voulais plus être vue dans ce fauteuil. » Alors lui vient l’idée de customiser l’objet de toutes les remarques. « Un jour, je me suis mise à le décorer, à ajouter des autocollants, de la couleur, pour casser ce côté sombre et glauque », relate Ji-woo.
Et le regard des autres change. Si les enfants et les passants continuent à la regarder, c’est cette fois avec étonnement devant un fauteuil roulant haut en couleur. « Pour une fois, je me sentais bien dans ce fauteuil, j’étais fière de l’avoir, dit-elle. C’est ce sentiment que j’essaie de donner aux enfants que j’accompagne. »
Redonner de la confiance
Accompagnée d’une designer et d’une photographe, Kim anime des ateliers dans lesquels des jeunes viennent décorer eux-mêmes leurs fauteuils. « On les laisse choisir le thème. Certains veulent des fleurs, des animaux ou des planètes. Ce sont leur fauteuil, ils doivent en être fiers », souligne-t-elle.
Au premier abord, les parents sont sceptiques, mais les retours de l’école ou de la rue semblent les convaincre. « Ils viennent me voir après les séances et me remercient d’avoir redonné de la confiance, de l’estime de soi à leur enfant », note Ji-woo.
Le projet terminé, elle a pu exposer ses créations et celles des enfants au centre Ieum à Séoul. « C’était un véritable honneur de pouvoir montrer mon travail dans un lieu prestigieux qui milite en faveur de l’intégration des personnes handicapées », remarque-t-elle.
Concernant la suite de ses projets, Kim Ji-woo explique n’avoir pas vraiment de plan défini. Une idée lui trotte dans la tête. « On mesure l’inclusivité d’un pays par la diversité que l’on voit dans la rue. En Corée du Sud, on voit peu de personnes handicapées et encore moins de femmes handicapées, observe-t-elle. Ce que je veux faire à présent, c’est mettre en avant cette double absence et y trouver des solutions. »