Audrey Zarif se prépare pour les jeux Olympiques de Paris 2024. Photo : Hugues Le Guellec/Nouvelle-République
Championne de France de tennis de table en 2023 et récente championne de France en double mixte, Audrey Zarif veut s’asseoir aux côtés des plus grandes et graver son nom dans le palmarès des jeux Olympiques. Une compétition qui demande préparations mentale et physique mais surtout détermination.
Par Arthur Charlier
Vingt ans plus tard, la pongiste française s’installe dans le club de Joué-Lès-Tours et lance activement sa préparation pour les jeux Olympiques de Paris. Les bonnes performances s’enchaînent et la jeune joueuse commence à s’imposer. Mais sa rupture avec son conjoint de toujours, Alex Robinot – lui aussi joueur de tennis de table professionnel –, la plonge dans une profonde dépression en septembre 2022.
Audrey s’éloigne de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep) et se retrouve pour la première fois, seule, dans un appartement, en Touraine. Des souvenirs qui la hantent : « C’était trop compliqué, je ne pouvais plus jouer, je n’avais plus rien. C’était la descente aux enfers. »
Pour obtenir un ticket de qualification pour les jeux Olympiques, Audrey Zarif doit passer plusieurs épreuves. Réalisé par Arthur Charlier/EPJT.
Cinq mois plus tard, elle reçoit un appel de la région Centre-Val de Loire : « Je comprends que je vais recevoir 12 000 euros de la Maison régionale de la haute performance et 4 000 euros du département. » Une délivrance qui lui donne l’opportunité de reprendre la compétition et de se lancer de nouveaux défis.
Audrey remodèle tout son staff technique pour se professionnaliser. Elle recrute Carole Grundisch, cinq fois championne de France de tennis de table. Sa nouvelle coach, et ancienne adversaire, ne la « reconnaissait plus. Ça se voyait qu’elle allait mal ». Elle prend en main ses entraînements.
Le 26 mars 2023, au terme d’une compétition qui lui est plutôt favorable, Audrey empoche son premier grand trophée : le championnat de France senior. Elle touche son rêve du bout des doigts et entre dans les 75 meilleures joueuses du monde. Depuis, tout s’enchaîne et la préparation se durcit. « À partir de mi-décembre, j’ai commencé à enchaîner les opens : Italie, Qatar, Inde et Angleterre, explique-t-elle. Je ne veux pas être la quatrième de l’équipe de France, mon but c’est d’être la troisième et je vais tout donner pour y arriver. ».
Et elle y arrive. En février 2024, elle devient championne du monde par équipe, à Busan, en Corée du Sud. L’étape suivante est évidemment les jeux Olympiques 2024, à Paris.
Songer aux JO pour représenter la France n’est cependant pas sa seule motivation. Même si c’est « une grande fierté ». Audrey se bat pour ses parents qui vivent toujours à Saint-Denis. Après les polémiques sur le prix des billets, trop élevés pour faire de ces Jeux ceux du peuple, elle pense à « faire profiter ceux que j’aime et qui n’ont pas forcément les moyens ».
Parce qu’au-delà de ses revers surpuissants et de ses services liftés, la néo-Tourangelle veut aider ses Pairs : « Je suis très empathique. Et en ayant vu la misère, j’aimerais aider ces gens pour qu’ils s’en sortent. J’ai toujours voulu être assistante sociale. Je le serais devenue si je n’avais pas réussi dans le sport. »
Audrey Zarif est à la recherche de sponsors pour participer au maximum de tournois possible. Photo : Audrey Zarif
Dans le jeu, Audrey progresse et performe. Du côté financier, ça coince. De l’argent, elle en manque, comme un grand nombre d’athlètes. Pour participer à des tournois qui lui permettent d’engranger des points et de gagner des places au classement mondial, l’espoir français du tennis de table doit vider ses poches. Faute d’une médiatisation trop légère et de sponsors peu convaincus par la discipline, « parfois, je dois me désinscrire de certains tournois. J’ai dû faire des choix pour gagner ma place aux JO ». Dès lors qu’une inscription est bouclée, les frais s’élèvent. Le prix du billet d’avion, la location d’un hôtel, l’achat d’équipements et le salaire de tout le staff sont à payer.
Et ces investissements ne rapportent pas toujours. Confrontée aux meilleures joueuses mondiales, Audrey peine à se hisser dans les derniers combats des tournois. Et si elle ne gagne pas, elle n’empoche ni argent ni points au classement. C’est ça, son principal problème. Mais grâce à son caractère de battante et son envie de réussir, la pongiste tourangelle est prête à foncer tête baissée pour entrouvrir la porte qui la mènera au bout de ses objectifs.
Carole Grundisch, ancienne joueuse professionnelle de tennis de table, peut apporter son expérience à Audrey Zarif. Réalisé par Arthur Charlier/EPJT.
Sortie du système scolaire à l’âge de 7 ans, Audrey suit depuis lors des cours à distance avec le Cned. Un choix qui l’a fait s’éloigner de sa famille et se retrouver seule, sans environnement social. « J’ai fait des concessions qui ont construit un quotidien différent par rapport aux autres. »
Aujourd’hui, après ses cinq heures d’entraînement et de renforcement physique, la pongiste suit une formation d’entraîneuse de tennis de table pour « s’assurer une sécurité ». Rares sont ses temps de repos mais elle profite de ceux-ci pour s’évader sur les réseaux sociaux. « L’image qu’elle montre sur les réseaux sociaux est différente de la vraie vie, elle est authentique et sanguine » s’amuse Carole Grundisch.
Cette saison, Audrey Zarif n’a pas chômé. Elle a beaucoup voyagé et a atteint son objectif principal, se qualifier pour les jeux Olympiques. Et même si les efforts n’ont pas tous été payés, la Française a ajouté une ligne à son palmarès. En double avec Alexandre Robinot, le duo a remporté le championnat de France en mars dernier. Désormais, concentration, entraînement et préparation, mais aussi repos, sont conseillés.
Des moments rares, il faut en profiter. Quand elle a un peu de temps libre comme ces dernières semaines, Audrey le consacre à la mode. « Je suis une fille banale. Ma vie c’est le shopping, aller sur les sites de marques et chercher des fringues », sourit-elle. Banal, d’être championne de France de tennis de table.
Arthur Charlier
@ArCharlier
22 ans.
Étudiant en journalisme à l’EPJT
Passé par Libération et SoFoot.
Attiré par la cuisine et les questions de société.
Aimerait travailler en presse écrite et faire des interventions en radio.