Pour apprendre à connaître cette ville nous avons décidé de passer par ce qui la cimente : sa jeunesse. Sur place, c’est grâce aux étudiants en architecture que nous avons pu voir à quoi ressemblait vraiment cette jeunesse marocaine.
Depuis notre base, établie au club de l’université Cadi Ayyad, nous avons enchaîné
les rencontres avec de jeunes Marocains. Autour d’un thé, sur le toit d’un café ou dans les ruelles de la Medina, nous avons parlé, rit et découvert.
Voici ce que nous avons ramené. Derrière ces articles se cachent surtout des rencontres. Être de la même génération que nos interlocuteurs nous aura permis de mieux les comprendre pour appréhender leur quotidien, leurs difficultés et leurs rêves. Parmi cette jeunesse, nous avons maintenant des amis. Nous espérons que vous l’aimerez autant que nous.
La rédaction
Salma Chbani El Idrissi
21 ans, étudiante à l’école d’architecture de Marrakech
« Ce qui me plaît, c’est la contradiction entre l’art et la technicité. Les belles
choses dans la vie sont nées de ce mariage complexe. »
Yassine ElOuarz
17 ans, médaille d’argent au JO de la jeunesse en 2018
« J’espère devenir champion du monde ou ramener une ceinture que jamais un
Marocain n’a ramenée. Je veux marquer l’histoire de mon sport dans mon pays. »
Youssef *
24 ans, étudiant à Marrakech
« Je pense que je vais quitter le Maroc. L’État ne nous a jamais rien donné, je ne vois pas pourquoi je devrais me sentir redevable en effectuant ce service militaire. »
Abdel*
20 ans, étudiant
« Ma consommation d’alcool n’est pas compatible avec la religion dans notre société. Quand je bois, je commence à pleurer parce que je pense à la religion et je me sens coupable. Tout ce qui fait des effets et fait perdre la logique est haram (interdit). »
Salma MOUNIR
20 ans, influenceuse
« À 16 ans, j’ai eu mon premier copain officiel. Je n’avais pas le droit d’aller chez lui mais nous y allions en cachette. La seule fois où j’ai pu me rendre chez lui avec l’autorisation de mes parents, c’est parce que je leur ai dit que j’allais rencontrer sa famille. »
Pamela Kabré
19 ans, en licence droit des affaires
« Je pense qu’il y a du racisme quand on a déjà une idée préconçue des gens. Donc le moindre mauvais geste de leur part, on va considérer ça comme du racisme. Moi, je ne trouve pas que les Marocains soient racistes. »
Zineb Belghazi
19 ans, athlète
« Quand je ne m’entraîne pas, je me sens faible et impuissante. »
Hassna el Assimi
23 ans, étudiante en architecture à l'Enam
« De plus en plus de jeunes femmes marocaines font de la musculation. Cette pratique se développe grâce aux réseaux sociaux, comme Instagram, où la poursuite d’un mode de vie sain est valorisée. »
Nazim Mohamed
23 ans, étudiant en médecine, suit des cours à l’Institut français de Marrakech
« Je perfectionne mon français pour m’ouvrir des portes et mieux comprendre mes cours de médecine qui sont tous dans la langue de Molière. »
Saad El Ouaqaf
24 ans, étudiant à l’Esav
« J’ai fais une licence de biologie puis j’ai tout changé pour venir à l’Esav. J’adore le cinéma iranien, le drame social, la réflexion sur ce qu’est la société. Pour moi, le cinéma peut faire évoluer la société et changer le monde. »
Étienne Xavier
22 ans, sans-papiers camerounais
« Dans le désert, tu ne peux pas t’arrêter, sinon tu meurs. Quand quelqu’un abandonne, on le dépose à côté et c’est fini pour lui. Nous n’avions pas le choix. Il y a des corps abandonnés partout. »
Hajar El Mhammedi El Alaoui
24 ans, étudiante en option mode au collège Lasalle
« J’ai toujours voulu faire du stylisme mais mes parents m’ont forcée à faire un bac scientifique. J’ai ensuite passé deux ans à la faculté et intégré un Institut de technologie appliquée. Après un an de chômage, j’ai insisté pour enfin étudier ma passion : la mode. »
Mohammad Chraibi
17 ans, membre de la PSG Academy
« Les équipes au Maroc ne sont pas fortes. C’est impossible de progresser si tu es dans l’un de ces clubs. La PSG Academy peut nous aider à devenir meilleur, pour viser l’Europe. »
3Zawi (prononcer Rzawi)
18 ans, rappeur
« Mon père ne veut pas que je fasse du rap. Il me dit toujours qu’il faut étudier. Nos parents ne savent pas que le rap peut nous apporter de l’argent parce qu’au Maroc, l’industrie musicale n’est pas développée. Pour l’instant je ne gagne pas beaucoup, mais je viens de commencer. »
Hajar Zazoura
24 ans, en formation au restaurant Amal
« J’aurais pu me marier, c’était la facilité, mais j’ai voulu saisir l’opportunité que m’offrait l’association pour aider ma mère et mon père malade. »
Amine Mouhtadi
19 ans, étudiant
« Personnellement, je vais à L’Envers essentiellement pour la musique. Mais j’y vais aussi pour les opportunités sociales que le bar offre. Les gens sont drôles quand ils sont bourrés. »
Mouad Rouicheq
19 ans, ultra du Kawkab Marrakech et étudiant à l'Enam
« Les ultras se rendent surtout au stade pour faire passer des messages politiques, notamment contre les inégalités et les injustices. Nous revendiquons d’être comme la voix du peuple. »
Fadwa
18 ans, étudiante en gestion des entreprises
« Nous sommes la nouvelle génération qui va changer le Maroc […] Chaque fille va retourner dans son village et elle va faire la différence. »
Yassir El Aidouni
20 ans, étudiant en architecture à l'Enam
« Ce n’est pas dans notre culture d’encourager les jeunes à devenir des leaders, à se démarquer et à exprimer leurs opinions. »
Un pays coupé en deux
Le Cameroun est divisé en deux parties depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Vaincue, l’Allemagne quitte le territoire qui est alors partagé entre la France, pour la partie orientale, et le Royaume-Uni, pour la partie occidentale. Le pays devient indépendant en 1960. Les mouvements séparatistes anglophones débutent après la proclamation de la République unie du Cameroun en 1972. Ces contestations prennent un tournant politique à partir du milieu des années 1990.
Aujourd’hui, ce pays d’Afrique subsaharienne vit une guerre civile qui passe inaperçue. Depuis novembre 2016, la minorité anglophone (20 % de la population du pays) proteste contre sa marginalisation. Les manifestations sont lourdement réprimées par le gouvernement en place.
La situation est alarmante, même si établir un bilan est compliqué. Il y aurait près d’1 millier de morts et 500 000 déplacés. Nées d’une crise socio-politique dans les régions anglophones du pays, ces tensions se sont transformées en conflit armé en 2017 entre les forces gouvernementales d’une part et différents groupes séparatistes d’autre part. La radicalisation de ce mouvement a été amplifiée par le blocage d’Internet dans une partie du pays entre février et avril 2017. Malgré une situation qui ne cesse de se dégrader, le conflit semble ignoré par la plupart des médias et la communauté internationale. Paul Biya, au pouvoir depuis trente-cinq ans, dissimule l’importance du conflit qu’il qualifie de simples « troubles ».