Du matin à la tombée de la nuit, ce sont plusieurs milliers de verres de vin qui sont bus lors des portes ouvertes du domaine Carême. Photo : Noé Guibert/EPJT.
Chaque année à Vernou-sur-Brenne, début décembre, les Carême présentent leurs nouveautés à une clientèle toujours plus importante. Un domaine où les vins de Touraine s’enrichissent de couleurs sud-africaines. Un rendez-vous que nous n’avons pas manqué.
Par Noé Guibert
Le couple s’est installé à Vernou-sur-Brenne, près de Vouvray, en 2006. Vincent est français, Tania est sud-africaine. Le cépage emblématique du Val de Loire, le chenin, est aussi le plus répandu en Afrique du Sud. La rencontre est donc moins surprenante qu’elle en a l’air
L’histoire commune du chenin blanc en France et en Afrique du Sud. Infographie : Noé Guibert/EPJT
Les vins qu’ils proposent sont issus de ce mélange des cultures et des savoir-faire viticoles. Les nombreux intéressés qui ont franchi les grilles de leur domaine en décembre peuvent ainsi goûter à ce mélange de local et d’exotique. Tous les ans, beaucoup en profitent pour faire leurs achats de Noël.
Les caves troglodytes offrent une température parfaite au vin. Photo : Noé Guibert/EPJT.
Tania tient à accueillir personnellement tous les visiteurs qui se présentent dans sa cour : à chaque nouveau venu elle sert les mains, elle tend des verres et invite à suivre le parcours de dégustation.
Dans les différentes caves troglodytes nichées dans la paroi rocheuse, des dizaines de tonneaux en bois sont alignés. Ils contiennent les différents vins produits sur le domaine. Depuis 2013, des vins produits en Afrique du Sud sont venus s’ajouter au traditionnel Vouvray AOC.
Le raisin n’est pas le seul fruit de ce mélange : leurs enfants Louis, 15 ans, et Pierre, 13 ans, travaillent avec leurs parents sur le domaine depuis qu’ils sont en âge de le faire. Cette année, ils font goûter aux visiteurs leur propre cuvée, un vin orange macéré de 2022 qu’ils ont réalisé tous les deux et dont ils ont produit près de 200 bouteilles.
Une ambiance chaleureuse
Parmi les badauds se mêlent de vieux habitués et de complets novices. Les premiers sont devenus des amis, tandis que les seconds le deviendront bien vite. L’ambiance chaleureuse du lieu pousse les inconnus à discuter autour du feu ou d’un tonneau. La clientèle régulière est très importante et reste fidèle d’année en année. Tania arrive à la table tenue par les enfants accompagnée par un homme d’une soixantaine d’années et le présente à ses fils : « Regardez les enfants, c’est le médecin de Vouvray qui vous soignait quand vous étiez tout petits ! »
Tous les autres exposants qui participent à l’événement, du fromager au bijoutier en passant par l’ostréiculteur, sont des connaissances du couple Carême. Cécile, qui expose ses sérigraphies, se réjouit de l’attractivité du vin : « Beaucoup de gens viennent acheter des bouteilles pour les fêtes et tombent sur mes créations par hasard. Ce genre d’événements permet de se faire connaître. »
Pour entretenir son attractivité, le vin ne peut pas reposer uniquement sur la fidélité de ses habitués et sur le bouche-à-oreille. Pour faire parler de ces portes ouvertes, Tania a mené une grande campagne en ligne. Sur les réseaux sociaux, Instagram et Facebook, ses publications sont vues par plusieurs centaines de personnes. Mais l’essentiel de la communication se fait par des mails, envoyés à plusieurs milliers de clients potentiels. Et ça marche ! Il n’y a plus une place pour les voitures dans le village, d’ordinaire très calme.
Le vin français, une exception
Ce succès continu ferait presque oublier que les agriculteurs français sont à la peine. Le panneau qui indique l’entrée de Vernou-sur-Brenne a d’ailleurs été retourné après que les agriculteurs de la FNSEA aient mené une grande action pour dénoncer la concurrence déloyale venue de l’étranger. Dans le monde agricole, le vin français fait figure d’exception. Le domaine Carême exporte d’ailleurs 40 % de sa production française vers les marchés étrangers, notamment les Etats-Unis.
La production du domaine Carême s’exporte dans le monde entier. Infographie : Noé GuibertT/EPJT
Les difficultés liées à la hausse des prix de l’énergie sont un moindre mal pour le domaine, car Tania et Vincent ont fait le choix de vendanges manuelles. Issue de l’agriculture biologique, la production est particulièrement sensible aux conséquences du changement climatique. Mais comme le dit Vincent, « bio ou pas bio, c’est difficile pour tout le monde. Nous, on s’en sort vraiment bien ».
Les fêtes représentent une part importante des ventes de vin. Pour beaucoup des visiteurs, ce dernier est un impératif de la tablée de fêtes. Patrick, qui est venu acheter quelques bouteilles, le dit : « Noël sans vin ce n’est pas vraiment Noël ! » Le prix du vin, bien inférieur à celui du champagne, est moins touché par les conséquences de l’inflation. La boisson reste abordable et chacun y trouve son compte au domaine parmi les mousseux, pétillants ou les vins sud-africains.
Le vin a donc de beaux jours devant lui, d’autant que le secteur est attractif et offre de nombreuses possibilités d’emploi. Les enfants des Carême souhaitent d’ailleurs tous deux devenir vignerons et reprendre l’exploitation familiale. Les deux garçons et leurs parents insistent : personne ne leur a forcé la main, il veulent travailler dans ce milieu. Ils pourront alors prendre la suite de cette aventure familiale, biologique et binationale.
Noé Guibert
Étudiant en journalisme à l’EPJT
Passionnée par le sport et l’histoire.
Passé par les sports de La Nouvelle République et la locale de Falaise de Ouest-France.
Aime le local, le national, le monde…