6 heures KFS du Mans

l’endurance à toute vitesse

Au départ, les pilotes s’élancent vers leur kart et partent pour six heures de course. Photo : Florian Pichet/EPJT

Les endurances KFS, premier niveau de karting compétitif, ont lieu quatre fois par an et la dernière se court au Mans, dans la cour des grands. C’est le format idéal pour découvrir le karting de compétition. L’an dernier, nous avons suivi Raphael Gassiarini, un des deux pilotes vainqueurs.

Par Florian Pichet

L’odeur d’essence à plein nez, le bruit constant des moteurs de compétition, un circuit mythique… L’ambiance qui règne au Mans est unique. Le son des Ferrari, des Lamborghini ou des Porsche qui accélèrent et changent de rapport, le crissement des pneus d’une fausse voiture de police américaine qui enchaîne les dérapages, le spectacle est autant visuel que sonore. Mais, très vite, le bruit sourd des voitures de course laisse place à celui plus fort, plus assourdissant, des karts. Ce sont eux, les vraies stars de la journée.

Il est tôt, il fait frais, mais la piste, elle, chauffe déjà. Le 11 novembre 2023, l’emblématique circuit international du Mans est le théâtre d’une épreuve d’endurance de karting : les 6 heures KFS. KFS, c’est la première catégorie de karts de compétition.

Le circuit international du Mans. Réalisé par Florian Pichet/EPJT

Raphael Gassiarini, 16 ans à peine, s’apprête à piloter. Il apprécie cette catégorie : « En KFS, le budget ne représente pratiquement rien et il n’y a pas beaucoup de modifications possibles sur le kart. C’est vraiment du pilotage pur. » Le budget, « environ 4 000 euros et on peut rouler », estime Michel Moreau, directeur de course. Une somme faible pour le monde du sport automobile où les montant vont très vite, dans les dizaines de milliers d’euros, rien que pour une course. « L’ambiance est bien plus sympa que dans les catégories supérieures. C’est du karting plaisir », ajoute Michel Moreau.

Des véhicules à plus de 115 km/h en ligne droite

La course du Mans est la dernière manche du championnat d’endurance. Après Salbris (au sud d’Orléans), Angerville (entre Orléans et Paris) et Laval (entre Rennes et Le Mans), les pilotes s’affrontent à nouveau pendant six heures. Les 47 équipes sont divisées en deux catégories, les 145 et les 160 correspondent au poids minimum en kilogrammes du kart et du pilote pesés ensemble. Les véhicules peuvent aller à plus de 115 km/h en ligne droite.

Au bord de la piste, la longue file des stands est bourrée de mécaniciens et de pilotes qui préparent les karts. Les équipes sont constituées de deux, trois, voire quatre pilotes, qui se relaient, au moins sept fois pendant six heures d’affilées. Plus de 420 tours, dans une course qui se termine de nuit.

Les quatre étapes du championnat 2023 d’endurance KFS. Réalisé par Florian Pichet/EPJT

Raphael Gassiarini fait partie de la formation Lap’s rk 4 – Bergerac karting. L’équipe « Lap’s » l’aide à participer à cette course. Son père, Thierry Gassiarini, détient un circuit de karting à Bergerac (Dordogne). Ici, il fait ici office de stratège, de mécanicien, de coach et de premier supporter.

Raphael Gassiarini est associé, sur son kart numéro 77, à Antoine Serget, un Tourangeau. Il est lui aussi épaulé par son père. Ils sont deuxièmes du championnat dans la catégorie 145. Mais, ce qu’ils visent, c’est la victoire de course. Une victoire au Mans, c’est spécial.

Au départ, les pilotes courent en ligne vers leur véhicule. Puis ils se lancent dans une épreuve tant physique que mentale. Durant toute la course, Thierry Gassiarini a les yeux rivés sur les chronos : « Nous voyons où nous en sommes par rapport aux autres. Puis nous surveillons la stratégie des concurrents aussi. »

« Sur six heures, c’est aussi l’équipe qui a le moins d’imprévus qui gagne »

L’aspect stratégique est très important sur les courses d’endurance. « Nous pouvons faire des longs relais au début, puis des plus courts sur la fin. Ou l’inverse. Ce ne sont pas simplement les plus rapides en pistes qui gagnent », explique Raphael Gassiarini.

Quand les temps au tour sont presque équivalents au dixième près, la différence peut également se faire dans les stands. Lors du changement de pilote, les équipes changent aussi le réservoir. Mais il y a des imprévus : une vis qui ne rentre pas, un moteur qui ne démarre plus, « amenez un démarreur, vite ! » entend-on parfois.

Les équipes communiquent avec les pilotes en piste à coup de grands gestes ou avec des panneaux. Mais, encore une fois, tout n’est pas toujours fluide. Un kart arrive pour effectuer le relai, mais son équipe n’est pas prête : « Putain ! C’est pas possible. J’ai prévenu deux fois. Vous ne me regardez pas ! » lâche en furie un pilote qui, de colère, jette ses gants. Pour l’équipe 77, tout se passe plutôt bien. Les arrêts sont de moins de dix secondes ce qui enthousiasme tout le staff.

Les pilotes conduisent aussi de nuit, pendant plus de deux heures. Ici, un changement de pilote, toujours un moment de tension lors duquel ils sont capables d’embarquer sur le kart en moins de dix secondes. Photo : Florian Pichet/EPJT

Le reste du temps, ils sont passifs. On sent la tension monter. Tout le monde sautille sous l’effet du froid et du stress. Dans le public, on essaie d’appeler les familles de temps en temps pour tenir au courant ceux qui n’ont pas pu venir.

Dans les stands, les pilotes qui attendent leur tour ne décompressent pas vraiment : « Je suis toujours en train de réfléchir à la stratégie, regarder ce que font les autres », explique Raphael Gassiarini.

À mesure que les heures passent, la température baisse, la luminosité aussi. Les visages, eux, se crispent peu à peu. « Ça va se jouer à rien », souffle rapidement le pilote du circuit Bergerac qui s’apprête à entamer son dernier relais. L’équipe 77 est deuxième.

Tout bascule, à vingt minutes du terme. Le kart en tête s’arrête à cause d’un souci mécanique. « Sur six heures, c’est aussi l’équipe qui a le moins d’imprévus qui gagne », glissait Raphael Gassiarini avant la course. Son père ne tient plus en place. « C’est géant ! Gagner Le Mans deux ans d’affilée, quel bonheur », s’exclame-t-il, un sourire jusqu’aux oreilles et des étoiles plein les yeux. La soirée se termine tard, dans l’euphorie.

Le jeune pilote sait que la course ne restera qu’une passion, par manque d’argent. « J’aimerais bien faire du commerce », confie-t-il. Lundi, il retournera dans son lycée, en Dordogne. « Je n’ai pas eu le temps de faire mes devoirs, mais, franchement, ça valait le coup. »

Les prochaines 6 heures KFS auront lieu à Salbris (Loir et Cher), le 5 octobre et au Mans (Sarthe) le 9 novembre. Suivre l’actualité du kart sur Evokart

Florian Pichet

Florian Pichet

22 ans
Étudiant en journalisme à l’EPJT
Passé par Le Courrier de l’Ouest et Le Maine libre
Particulièrement intéressé par l’international, la politique et le sport (spécialisation NBA)
Se destine à la presse écrite