Les zoos
Au fil du temps, les zoos sont devenus un des principaux outils de sauvegarde des espèces animalières sauvages. Mais ce sont aussi, et surtout, des entreprises qui doivent préserver leur activité économique. Pour séduire de nouveaux publics, ils doivent jongler entre les contraintes. Et quand la logique commerciale l’emporte,les dérives ne sont pas bien loin.
Qui n’aimerait pas voir de près des animaux sauvages sans avoir à prendre l’avion ou à parcourir de longues distances ? Les parcs zoologiques connaissent un succès jamais démenti. Pour le dictionnaire, le zoo est un « lieu public où sont présentés aux visiteurs des animaux en captivité ou en semi-liberté et appartenant à des espèces exotiques ou rares ». Mais la réalité est beaucoup plus complexe.
Si complexe que les propritaires ou gérant des zoos sont bien peu disert. Si à la Boissière-du-Doré, Sébastien Laurent, le directeur, n’hésite pas à ouvrir ses portes pour en expliquer le fonctionnement de son parc et à mettre en avant les objectifs des zoos 2.0. Il est bien le seul à accueillir des journalistes sans sourciller. A La Flèche par exemple, se déroule l’émission de téléréalité « Une saison au zoo » qui met les soigneurs en vedette. Si tous les sujets y sont abordés, notamment ceux concernant la préservation des animaux ou la génétique, le parc refuse de communiquer.
A Beauval, qui se dit numéro un en France, le silence est aussi règle d’or. « Les zoos sont là pour rappeler aux personnes qu’il faut préserver la nature, les espèces, donc faire de la pédagogie, agir directement sur la protection in situ et ex situ. Ça ne sert à rien de chercher la polémique », affirme Matthieu Galand, ancien responsable de l’équipe de soigneurs avant d’ajouter : « Je vais arrêter ma conversation ici avec vous. Je pense avoir tout dit. » Nicolas Leroux, membre de l’équipe du fameux zoo de Beauval tient le même discours que son ancien collègue. Les zoos de Vincennes, de Cheptainville et de Thoiry ne seront pas plus bavards : refus catégorique pour les uns, silence radio pour les autres.
Le but d’un zoo est d’assurer à long terme la survie de l’espèce en captivité.
Sébastien Laurent
Au zoo de La Boissière-du-Doré, Sébastien Laurent s’en étonne. Il ne voit pas ce que ses confrères pourraient avoir à cacher. Dans son bureau exigu, où s’entassent documents, tableaux et photos d’animaux, il planifie la gestion du parc. Pour lui, « le but d’un zoo est d’assurer à long terme la survie de l’espèce en captivité ». En France, les parcs comme le sien, membres de l’Association française des parcs zoologiques (AfdPZ), cotisent et doivent soutenir des actions qui œuvrent pour la protection de la biodiversité. La Boissière-du-Doré reverse chaque année près de 25 000 euros à différents programmes grâce à l’argent récolté au stand maquillage et aux journées conservation.
« Dans les années quatre-vingt, le but était de stocker le maximum d’espèces dans le minimum de place. On avait des normes de 80 mètres carrés pour un couple de panthères », se rappelle Sébastien Laurent. Avant le XIXe siècle, les espèces exotiques sont regroupées dans des ménageries privées. Le bien-être des animaux n’est pas la préoccupation majeure des propriétaires, qui se consacrent uniquement au divertissement du public. Les bêtes sont arrachées à leur milieu naturel de façon anarchique. Pour les capturer, les propriétaires on recourt à des « capteurs ». « Des capteurs repentis ont estimé qu’entre 15 et 30 % des animaux succombaient lors de la prise, en général. Ces chiffres pouvaient êtres plus élevés, 80 % pour les gibbons du Laos », précise Eric Baratay dans son ouvrage Belles et captives : une histoire des zoos du côté des bêtes. A cette mortalité s’ajoutait celle qui survenait pendant le transport ou la période d’adaptation de l’animal dans son nouveau milieu, ajoute l’auteur.
Mais à partir de l’entre-deux guerres, les scientifiques se rendent compte que la faune s’amenuise et les ménageries sont pointées du doigt. A l’échelle internationale, des politiques visent à protéger la biodiversité se mettent en place. Elles aboutissent à la création, en octobre 1948, de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN ). Les ménageries s’agrandissent et prennent alors le nom de parcs zoologiques.
« Aujourd’hui la tendance est au minimum d’espèces dans un maximum de place, souligne Sébastien Laurent. En témoigne les espaces que l’on présente chez nous, avec les girafes qui ont 3 hectares, les rhinocéros 5 hectares… On veut se rapprocher au mieux des grandes plaines africaines. » Lorsque le visiteur déambule dans le zoo de La Boissière-du-Doré, il n’est pas assuré de voir de près l’animal qu’il désire contempler. Les célèbres pandas roux se dissimulent en haut des arbres, à l’abri des curieux qui collent leur nez à la vitre. Si cet agencement peut agacer le public, il est nécessaire pour préserver la tranquillité des animaux.