La nouvelle n’a pas échappé pas à la presse. « […] Une faute de la mairie plus lourde et plus sérieuse qu’il n’y paraît » pour Le Journal du dimanche, « […] Est-ce une bonne idée ? » s’interroge Libération et carrément « Un camp naturiste verra bientôt le jour à Paris » pour Le Figaro. La décision a monopolisé un temps l’espace médiatique. Pourtant, pour l’instant, « le projet est encore embryonnaire » si on en croit David Belliard, co-président du groupe écologiste à la mairie de Paris et coordinateur du projet.
La polémique indigne Jérôme Gleizes, conseiller écologiste à la mairie de Paris : « Pour moi, il faut faire retomber la pression. Ce n’est pas nouveau. Il y a tout un débat autour de la nudité qui n’a pas lieu d’être. Les naturistes ne font pas une fixation sur le corps des autres ou le leur. Il s’agit d’être en harmonie avec la nature et de se départir de toute connotation sexuelle. » Le naturisme se définit d’ailleurs, depuis le Congrès international du naturisme au Cap d’Agde en 1974, comme « une manière de vivre en harmonie avec la nature […] caractérisée par une pratique de la nudité en commun qui a pour but de favoriser le respect de soi-même, le respect des autres et celui de l’environnement ».
Début septembre 2016, vous les avez peut-être croisés à la Fête de L’Humanité. Invités pour la première fois, ils en ont profité pour faire découvrir leur mode de vie. Une réussite à en croire Yves Leclerc, vice-président de la Fédération française de naturisme : « À notre grande surprise, les organisateurs et les passants ont été très chaleureux. Certains se sont même spontanément déshabillés dans notre stand. »
Ces initiatives ne sortent pas de nulle part. Les adeptes du naturisme sont plus de 2,6 millions en France. Il faut dire qu’ils ont l’embarras du choix. L’Hexagone compte plus de 460 espaces : des plages, des campings, des gîtes et des centres de vacances. Certaines rares piscines proposent même des créneaux naturistes, à l’image du complexe Roger-le-Gall à Paris.
Le naturisme a toujours intrigué. Vous-mêmes, vous ne lisez pas cette enquête par hasard. Les reportages se multiplient sur nos écrans. Mais cette surmédiatisation est, en fait, à double tranchant. « Chaque année, une certaine presse écrite et quelques chaînes de télévision annoncent, avec force publicité, la divulgation de reportages “exclusifs” sur les pratiques étranges des “naturistes” […] Un même sujet est chaque année de retour : les naturistes/échangistes du Cap d’Agde », dénonce Marc Bordigoni, anthropologue à l’Institut d’ethnologie méditerranéenne, européenne et comparative, dans son livre Les Naturistes. Certaines émissions – aussi rares sont-elles – informent et tentent de présenter le sujet sous un prisme sérieux. La plupart préfère rendre le sujet sensationnel, annoncer des conditions de tournage difficile et ainsi faire de l’audience.
De plus, même si les naturistes trouvent beaucoup d’espaces en France, ils restent confinés, à l’écart de l’espace public. Ils doivent se limiter à des centres, des campings ou des plages. Jacques Frimon, vice-président de l’Association pour la promotion du naturisme en liberté (Apnel) souhaite sortir des camps : « Nous voulons éviter ce côté communautaire qui nous a été imposé. Nous sommes la dernière population en France à devoir nous enfermer. » En ce sens, le projet parisien est une aubaine. Parce que vivre naturiste représente un budget. « Tout le monde n’a pas les moyens d’aller dans des centres naturistes », poursuit Jacques Frimon.
Depuis une décennie, certains militent pour que la nudité soit considérée comme un droit fondamental. Ces revendications ont donné naissance à l’Apnel. Cette association se bat aussi pour une dépénalisation de la nudité dans l’espace public.