Faussaires du quotidien
Philippe Leblanc et Maria* sont parvenus à travailler pendant des années grâce à de faux diplômes. Passion d’un métier pour l’un, nécessité financière pour l’autre, les raisons d’une telle usurpation peuvent être très différentes. Reste qu’ils ont tous deux été démasqués.
En cinq minutes je te fais un diplôme d’aide-soignante, si c’est plus simple », lâche, un soir de 2012, un ami de Maria*. Il s’y connaît en informatique. Cette femme de 36 ans, divorcée avec trois enfants à charge, vit dans la région Centre-Val-de-Loire. Son congé maternité terminé, elle ne peut compter ni sur son bac ni sur son expérience de secrétaire dans un établissement de soin pour retrouver du travail.
Ses multiples entretiens d’embauche ne mènent à rien. Un conseiller Pôle Emploi lui glisse qu’avec un diplôme, elle pourrait se faire embaucher. En quelques clics, son ami trouve le document sur Internet, le modifie au nom de Maria et invente des expériences sur son CV. La machine est lancée.
Au centre hospitalier de la ville, Maria s’est fondue parmi le personnel pendant neuf mois, faisant les lits, la toilette et les repas des pensionnaires. La fausse aide-soignante de Blois n’a éveillé les soupçons de personne. « Son travail était excellent, le personnel en était satisfait », précise son avocate, Sandrine Cariou. En 2013, ses supérieurs ont d’ailleurs complimenté sa « pertinence dans les approches soignantes » et son « aisance relationnelle, tout à fait adaptée envers les résidents et les familles ».
Selon le psychanalyste Pascal Neveu, il n’y a rien d’étonnant à constater les compétences de Maria.
« Les personnes qui exercent sans diplôme se sentent investis par leur rôle. Ils le vivent comme une mission indispensable. Étonnamment, ils ont parfois une connaissance bien plus précise qu’un spécialiste diplômé car ils doivent tout maîtriser par nécessité. »
Mais la supercherie a fini par être découverte. Elle s’est fait attraper par une maison de retraite où elle avait travaillé avant, « suite à un petit accrochage avec quelqu’un de la direction, raconte son avocate. Cette personne a regardé son diplôme plus attentivement et s’est rendue compte que l’autorité qui l’avait délivré n’était pas la bonne. Le service n’était pas celui des aides-soignantes, donc c’était forcément un faux. »
Son employeur du moment est immédiatement averti. La jeune femme est alors licenciée pour faute lourde et jugée en avril 2014. Néanmoins, le centre hospitalier ne souhaite pas se constituer partie civile. Maria est condamnée à trois mois de prison avec sursis, sans inscription dans son casier judiciaire.